
- 22 mars 2022
- Slim Hedi Chekili - AMEF Consulting
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BANQUE DE DETAIL ET EVOLUTIONS SOCIETALES ET TECHNOLOGIQUES
I. Introduction
La Banque de Détail (BDD) d’aujourd’hui est une organisation complexe qui évolue dans un environnement fortement impacté par les évolutions à la fois sociétales et technologiques ainsi que par un cadre réglementaire en liaison avec l’évolution des risques du métier de banquier. Il lui est donc impératif d’intégrer l’influence de ce contexte dans ses choix stratégiques à venir.
Ces évolutions n’ont pas seulement impacté le potentiel de croissance de l’activité de la banque de détail, mais elles ont aussi entraîné des changements dans son organisation ainsi que dans les interactions entre la banque et ses clients d’une part et ses collaborateurs d’autre part.
Nous n’aborderons pas dans ce qui suit, les évolutions liées aux aspects réglementaires ayant trait aux normes bâloises en matière prudentielle, de lutte anti-blanchiment et financement du terrorisme ou encore de bonne gouvernance et de conformité.
Nous nous limiterons aux principales évolutions sociétales et technologiques et à leur impact sur l’organisation et l’activité de la banque de détail dans sa relation avec le client aussi bien interne qu’externe
II- Banque de Détail et Evolutions Socio-culturelles
Sur le plan sociétal, il est à souligner une évolution progressive des comportements du consommateur dont la satisfaction et la fidélisation se situent au cœur des préoccupations de la banque en tant que garant de sa pérennité. Cela résulte des évolutions générationnelles observées successivement depuis l’après-guerre à savoir :
- Nés entre 1946 et 1965, les « Baby-Boomers» ont commencé leur carrière à la fin des années 70 et aujourd’hui ont atteint l’âge de la retraite.
- La « Génération X» née entre 1966 et 1979 est aujourd’hui au sommet en termes de carrière et de situation financière. Le travail est au cœur des préoccupations de cette génération, égocentrée, stressée qui s’adapte moins facilement aux nouvelles situations, par peur de perdre son emploi.
- Née entre 1980 et 2000, la « Génération Y » encore appelée « Milléniaux » qui aura entre 20 et 40 ans en 2020 est une génération « connectée » qui commerce en ligne, utilise des smartphones et dont les achats sont fortement influencés par les réseaux sociaux.
- La « Génération Z» née à partir de l’an 2000 n’est pas encore arrivée sur le marché de travail. Considérée comme la génération silencieuse, la technologie domine son quotidien. Elle est née avec et ne sait pas vivre sans l’internet qui est devenu son principal outil de communication pour interagir aussi bien à titre privé que professionnel.
L’instantanéité et la diversité des sources d’informations font que les comportements en matière de consommation de produits financiers évoluent sensiblement : Le client est aujourd’hui mieux informé, plus impatient, plus exigeant et plus volatil.
Les préoccupations des jeunes sur les sujets écologiques par exemple font que ceux-ci développeront également une attitude plus favorable vis-à-vis de la banque qui en plus de son rôle économique s’investit sur les questions sociales, environnementales et de développement durable.
III- Banque de Détail et Evolutions Technologiques
Sur le plan technologique, les innovations et de nouvelles formes de concurrence ont incité la banque de détail à revoir son organisation ainsi que son offre de produits et services.
La FinTech, terme issu de la fusion des mots « finance » et « technologie », propose des services financiers en s’appuyant sur les nouvelles technologies numériques.
Grâce à ses avantages technologiques et à certaines asymétries réglementaires, la FinTech a réussi à capter des parts de marché sans pour autant remettre véritablement en cause la domination des grandes banques qui tendent à privilégier des stratégies partenariales.
La FinTech propose en effet des services tant en B to B qu’en B to C, en développant même des offres à destination de la banque traditionnelle. Elle vise des activités de niche (transfert d’argent, financement participatif…) et se caractérise par son agilité et un business model évolutif, centré sur les besoins du client.
La FinTech bénéficie ainsi d’un avantage technologique sur la banque qui peine à moderniser ses systèmes d’information, face aux charges très élevées de maintenance des outils existants et aux coûts croissants liés à la cybersécurité.
Face à la rapidité des transformations technologiques, les banques perçoivent les startups comme des alliés potentiels. Ces dernières années, plusieurs groupes bancaires ont engagé des partenariats avec les Fintech afin d’offrir à leurs clients des services de meilleure qualité sans avoir à développer leurs propres systèmes. BPCE a par exemple racheté Fidor Bank et LePotCommun.fr, BNP Paribas a racheté Compte Nickel et le Crédit Mutuel s’est emparé de Leetchi et MangoPay.
La majorité des banques sont désormais prêtes à sauter le pas pour améliorer leur expérience client tout en réduisant les coûts opérationnels.
Par ailleurs avec le développement du Big Data, l’émergence de nouveaux acteurs sur le marché financier avec les GAFAM, les Telco et les Néobanques est venue concurrencer la banque traditionnelle.
Axées sur l’expérience utilisateur, 26 néobanques en France avec 3,5 millions de comptes actifs permettent aux clients de profiter de services qui ne figurent pas encore dans les applications des banques traditionnelles.
En général, ces banques en ligne sont des filiales de groupes bancaires. Les tarifs proposés par ces néobanques sont très compétitifs, l’expérience bancaire est simplifiée, la procédure d’inscription est rapide et toutes les opérations sont rapidement réalisées. (Source : Actionco.fr)
Le développement de l’intelligence artificielle fait partie, avec la blockchain notamment, des technologies permettant aux métiers de la banque et de la finance d’accélérer leur transformation numérique.
IV- Banque de Détail et Relation Client
L’impact sur la relation Client du processus de transformation digitale entamé par les banques s’est matérialisé par la création de produits et services innovants (chatbot, roboadvisor…) la simplification des processus opérationnels (workflow…) afin de faciliter le parcours client et de créer une expérience client digitale qui soit mémorable.
Le consommateur recherche une prestation simple, rapide et bon marché et souhaite désormais pouvoir « consommer la banque » à tout moment, où qu’il soit et au moyen de différents terminaux/canaux interconnectés « ATAWAD : Any Time, Any Where, Any Device ».
Le « zéro papier- zéro déplacement » se traduit par une baisse sensible de la fréquence des déplacements physiques en agence. La banque de détail est tenue de passer d’une distribution multi-canal au profit d’une approche cross-canal en offrant la possibilité à son client d’entamer une transaction sur un premier canal et de conclure cette même transaction sur un second canal.
La création d’une nouvelle fonction assurant la gestion de canaux de distribution interconnectés est ainsi devenue un impératif stratégique.
La révolution digitale participe d’un côté à l’intensification de la concurrence sur le marché bancaire et d’un autre côté, offre de nouvelles opportunités de diversification de la panoplie de services à la clientèle.
Dans ce sens, les plateformes de financement participatif ont connu un développement récent en offrant aux TPE, PME et PMI des sources de financement différentes des prêts bancaires classiques et plus adaptées à leurs besoins.
D’après le baromètre du crowdfunding, la France comptait 205 plateformes de financement participatif en 2020 qui au total ont collecté environ 1 020 millions d’euros, soit une hausse de 62 % par rapport à 2019.
Cependant, ces sommes restent marginales face aux prêts bancaires mobilisés par les entreprises françaises, dont le montant des encours avoisine les 1 200 milliards d’euros. (Source : La finance pour tous)
L’exploitation du Big Data au niveau de la stratégie marketing vise à améliorer la connaissance des clients afin d’instaurer un lien de plus grande proximité permettant une démarche pro-active en termes d’adéquation du produit au profil/besoin du client.
Le « Big Data » représente en effet une masse hétérogène de « méga-données » numériques en croissance exponentielle produites par les clients dont l’exploitation par la banque requiert des outils informatiques de stockage et d’analyse spécifiques de plus en plus sophistiqués.
V- Banque de Détail et Approches Managériales
L’évolution des modes de management découlant des mouvements générationnels requiert de répondre à de nouvelles attentes et exigences des collaborateurs en termes de qualité de vie au travail qui est devenue une composante essentielle du management moderne : les collaborateurs aspirent aujourd’hui à plus de reconnaissance, de mobilité, d’accompagnement, de participation aux décisions ainsi qu’à une simplification/raccourcissement des niveaux hiérarchiques.
Le manager d’aujourd’hui est donc désormais dans l’obligation d’améliorer la communication au sein de son équipe et de favoriser la coopération et le recours à l’intelligence collective de plus en plus nécessaire à l’implication des collaborateurs et au développement de la banque.
Parallèlement, les évolutions technologiques ont permis à la banque d’introduire de nouvelles formes d’organisation du travail en termes d’aménagement des espaces et des horaires (open space, flex office …) et d’outils de « digital working » aussi bien individuels (smartphone, tablette …) que collaboratifs (borne wifi, visio-conférence, intranet …)
Le télétravail a quant à lui, connu une forte accélération à la suite de la pandémie liée au Covid-19 et devrait rester une pratique régulière dans le futur dès lors que cela se traduira par des gains de productivité améliorant le coefficient d’exploitation de la banque.
VI- Conclusion
La transformation numérique et l’exploitation de nouvelles technologies par les banques en collaboration avec de nouveaux acteurs de la finance n’ont de véritable sens que si elles sont ressenties de façon positive à la fois par les clients et par les collaborateurs.
Une étude mondiale réalisée par Finastra (société spécialisée dans le développement de logiciels) avant la pandémie de Covid-19 auprès de près de 800 institutions financières et bancaires aux États-Unis, au Royaume-Uni, à Singapour, en Allemagne, à Hong Kong, aux Émirats Arabes Unis et en France, montre que les partenariats stratégiques avec les FinTechs se multiplient et sont perçus comme une réussite par les banques.
Près de 80% d’entre eux estiment que les partenariats conclus avec ces startups présentent des avantages plus importants que les coûts engendrés dès lors qu’ils permettent d’améliorer l’expérience client tout en réduisant les coûts opérationnels.
La banque se doit désormais d’agir non seulement en vue de veiller à la satisfaction du client mais également à la satisfaction collaborateur, faute de quoi elle se heurtera à la difficulté de fidéliser ses clients et de retenir ses meilleurs talents.
Les Fintechs représentent un enjeu majeur en termes d’innovation, de croissance et d’emploi dans le monde entier. Ces entreprises innovantes utilisent les technologies numériques, mobiles et de l’intelligence artificielle pour fournir des services financiers plus efficaces et moins coûteux.
Elles offrent une variété croissante de solutions, tant aux particuliers qu’aux entreprises. De nombreux facteurs ont favorisé l’arrivée de ces Fintechs. Outre l’émergence de nouvelles technologies, il s’agit également d’évolutions économiques, sociologiques, managériales et générationnelles.
Merci de me transmettre d’autres references pour ce type d’etudes!