- 24 janvier 2022
- Mongi Ben Tkhayat - AMEF Consulting
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REALITES ET PERSPECTIVES DE LA FINANCE CLIMAT
Depuis plusieurs années et en particulier depuis les Accords de Paris 2015 dans le cadre de la COP21, nous parlons de plus en plus de la Finance Climat / Finance Verte. Depuis, des initiatives et des programmes régionaux ont été mis en place pour soutenir son développement à l’échelle mondiale. Alors où en sommes-nous aujourd’hui et quelles sont les perspectives de la Finance Climat ?
1. Qu’est-ce que la Finance Climat ?
Selon la Convention Cadre des Nations Unis pour le Changement Climatique (UNFCCC), la Finance Climat fait référence à tout financement local, national ou transnational, quelle que soit sa source publique, privée ou alternative, qui vise à soutenir des actions d’atténuation ou d’adaptation permettant de lutter contre le changement climatique.
En d’autres termes, la Finance Climat est une activité financière / de financement dont l’objectif est de soutenir la lutte contre le changement climatique néfaste pour la Terre et les Populations. Ceci se fait à travers le financement de deux types principaux d’actions ou de projets :
- Des actions qui permettent de réduire les effets négatifs des activités de tous types sur le climat – actions d’atténuation (par exemple : produire avec une consommation d’énergie moindre permettant de réduire la quantité de gaz à effet de serre émis)
- Des actions qui permettent de changer nos modes de vie et de production préservant le Climat – actions d’adaptation (par exemple : utilisation de l’énergie solaire dans la production de l’énergie électrique ou pour chauffer l’eau)
A noter l’importance de développer une taxonomie précise, commune et large relative à la Finance Climat pour renforcer la confiance des investisseurs et des différentes parties prenantes dans cette finance. A ce propos, nous pouvons mentionner la taxonomie établie par l’Union Européenne pour la Finance Durable adopté en juin 2020.
Les taxonomies sont des systèmes de classification de la finance durable. Elles ont pour ambition d’être plus exhaustives et d’avoir une approche systémique, par rapport à de simples définitions de produits financiers durables. Qu’il s’agisse de simples définitions, ou de systèmes plus complets de taxonomies, définir ce qu’est la finance durable peut apporter des bénéfices économiques. Ceux-ci incluent l’amélioration de la transparence du marché. Des définitions plus précises et plus cohérentes de la finance « verte » et « durable » peuvent faciliter l’investissement en donnant davantage de confiance et de certitude aux investisseurs. En outre, ces définitions peuvent permettre de mesurer plus facilement les flux financiers durables, de manière à en suivre l’évolution, ou bien à mettre en œuvre des instruments de politique économique soutenant une croissance de ces flux. (source OCDE : Construire des définitions et des taxonomies de la finance durable)
2. Les enjeux et les objectifs de la Finance Climat
La Finance Climat s’est développée pour mieux mobiliser et orienter les ressources financières à tous les niveaux vers des actions et investissements qui préservent le climat contre des changements néfastes, voire destructifs. Ceci vient en appui de la réalisation de l’objectif de l’Accord de Paris qui consiste à limiter l’augmentation de la température moyenne à 1,5 °C au cours du 21ème siècle, par rapport à la période d’avant la révolution industrielle.
L’enjeu principal de la Finance Climat consiste à réorienter une grande part des ressources financières vers le financement des investissements qui préservent notre environnement et notre climat contre un changement néfaste et irréversible. Ceci induira à terme une baisse dans l’émission des gaz à effet de serre et la réduction de l’intensité Carbone[1].
3. La collaboration harmonieuse entre des différentes parties prenantes
Le Takaful a permis de passer d’un modèle d’assurance dit conventionnel basé sur une relation contractuelle entre un assureur et des assurés (relation dont l’issue est aléatoire et incertaine) vers une relation mutualiste fondée sur l’entraide entre des « assurés », dits participants ou adhérents qui s’auto-assurent les uns les autres.
Ceci en permettant ainsi d’éviter toute incompatibilité charaïque notamment en matière de renforcement de la transparence et d’abolition du Gharar « issues ambigües et incertaines » dans les contrats et les formulaires de la finance islamique d’une façon générale d’une part et l’interdiction du Riba dans les opérations de placement des excédents du fonds des adhérents d’autre part.
L’assurance Takaful doit à ce titre et obligatoirement reposer sur les fondements essentiels suivants :
- Considérer les contributions (les cotisations d’assurance) comme étant une donation
(تبرع) de la part du client (participant) au profit du fond takafull. - Soumettre toutes les opérations d’assurance Takaful à l’approbation d’un comité charaïque habilité à contrôler toutes les transactions de l’entreprise, à émettre son avis concernant leur conformité à la Charia et à répondre à toutes les questions relatives à l’activité de l’entreprise
- Veiller au maintien d’une séparation totale entre le fonds des actionnaires et le fonds des adhérents.
- Distribuer le surplus dégagé entre les adhérents et ce selon la méthode approuvée par le comité charaïque de l’entreprise d’assurance Takaful.
- Dans le cas où le fonds des adhérents enregistre un déficit, les actionnaires s’engagent à le combler à travers un prêt sans intérêt qui sera remboursé ultérieurement à partir des surplus futurs dégagés par le fonds des adhérents.
- Investir les avoirs du fonds dans des placements conformes à la Charia
4. La mobilisation des ressources financières
Le maintien de l’augmentation de la température moyenne en dessous de 1,5°C nécessite beaucoup d’investissements d’atténuation et d’adaptation dont la réalisation requiert des ressources financières publiques et privées très importantes. Or les investissements verts sont aujourd’hui encore faibles. En effet et selon une étude récente publiée par Novethic en novembre 2021, intitulée « les limites des fonds verts en Europe », la part des investissements verts ne représente que 1,3 % du total des encours au 30 juin 2021, avec un montant de 202 milliards d’euros.
Par ailleurs, plusieurs initiatives et mécanismes pour orienter plus de fonds financiers vers des investissements verts sont développés à l’échelle régionale dont notamment :
- Fonds Climat Vert (Green Climate Fund)[2]
Ce Fonds a été créé en 2010 dans le cadre des accords de Cancun en Mexique (COP 17). C’est un véhicule financier dédié aux pays en développement dans l’approche globale climatique, en tant que dispositif financier de la mise en place de la Convention cadre des Nations Unies de changement climatique et les Accords de Paris. Depuis sa création, ce fonds a pu mobiliser environ USD 10 milliards à ce jour.
- Emprunts verts – durables
Pour la mobilisation de beaucoup de ressources pour la Finance Climat, il a été opportun de mobiliser les partenaires financiers pour cette activité. C’est dans cet objectif que plusieurs parties ont travaillé sur l’élaboration de manuels /guides d’émission d’emprunts obligataires en relation avec la Finance Climat :
- Emprunts Verts
- Emprunts Sociaux
- Emprunts Durables
Ceci a permis la mobilisation d’importantes ressources pour la Finance Climat via les marchés financiers. Ainsi, le marché mondial des obligations vertes a fortement progressé depuis sa genèse en 2007. Sur la période 2014-2020, il y a eu 6 984 émissions d’emprunts verts (deals) pour un montant global de USD 945 milliards[3].
- UNEP-FI
L’Initiative Finance du Programme Environnement des Nations Unies (UNEP FI) est un partenariat entre l’UNEP et le secteur financier mondial pour la mobilisation du secteur financier privé dans le développement durable.
UNEP FI travaille avec plus de 450 banques, compagnies d’assurance et investisseurs pour développer un secteur financier avec un impact positif pour les personnes et la planète.
UNEP FI a permis seule ou en collaboration avec d’autres institutions et programmes d’établir des cadres pour une contribution positive et significative du secteur financier dans le développement durable des économies. Citons à titre d’exemples les cadres suivants :
- Les principes d’une activité bancaire responsable : lancés avec plus de 130 banques détenant collectivement USD 47 000 milliards d’actifs, soit un tiers du secteur bancaire mondial.
- Les principes d’une assurance durable : établis en 2012 par l’UNEP FI et appliqué aujourd’hui par un quart des assureurs mondiaux.
- Les principes d’investissements responsables : établis en 2006 par l’UNEP FI et le Pacte mondial des Nations Unies, appliqués aujourd’hui par la moitié des investisseurs institutionnels dans le monde (USD 83 000 milliards).
5. Le cadre réglementaire et prudentiel
Pour orienter de plus en plus les ressources financières vers le financement de projets qui préservent l’environnement et limitent le changement climatique négatif, il est tout à fait important de promulguer des lois et des réglementations qui à la fois encouragent et pénalisent les institutions financières par rapport à la thématique du changement climatique.
Ces réglementations sont aussi de nature protectrice des institutions financières contre les risques financiers induits par le changement climatique. C’est dans ce sens que plusieurs institutions et organismes de régulation et de supervision du secteur financier ont créé le Network of Central Banks and Supervisors for Greening the Financial System – NGFS.
Ce réseau a été créé en 2017 par 8 banques centrales et superviseurs lors du somment « One Planet » ayant eu lieu à Paris. Depuis, le nombre des membres de ce réseau a évolué pour se situer aujourd’hui à 105 membres et 16 observateurs.
L’objectif de ce réseau est de contribuer au renforcement de la réponse globale requise pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris et de renforcer le rôle du système financier pour gérer les risques et mobiliser des capitaux pour des investissements verts et à faible émission de carbone dans le contexte plus large d’un développement environnementalement durable. A cette fin, le Réseau définit et promeut les meilleures pratiques à mettre en œuvre au sein et en dehors des membres du NGFS et mène ou commande des travaux d’analyse sur la finance verte. A travers ses 5 groupes de travail, NGFS a développé plusieurs documents de référence pour le développement de la Finance Climat.
6. La Finance Climat en Afrique
Dans son dernier rapport « The Finance in Africa », la Banque Européenne d’Investissement a dédié tout un chapitre à la Finance Verte en Afrique. Nous évoquons ci-après les principaux éléments développés dans ce rapport de la BEI :
- Le Centre Africain de Politique Climatique a calculé qu’une augmentation des températures mondiales de 1 °C entraînerait une contraction de 2 % du produit intérieur brut de l’Afrique.
- Le marché des obligations vertes en Afrique reste petit par rapport aux autres régions. L’Afrique ne représente qu’environ 0,2% du marché mondial des obligations vertes.
- Les banques africaines font des investissements verts, même si ceux-ci représentent encore une petite part de leurs portefeuilles. Les banques africaines considèrent la faible demande de financement vert et l’insuffisance de capacités techniques de leur personnel comme étant les principales contraintes d’investissement dans ce secteur.
- Bien que les institutions de microfinance représentent des volumes de financement vert plus faibles que les banques, elles contribuent à la satisfaction des besoins du marché en termes de financement d’investissements verts
- Le Private Equity peut soutenir des investissements allant des grands projets d’infrastructure aux startups à forte croissance, bien qu’en pratique l’infrastructure absorbe les plus gros volumes. Les investissements verts pour la seule année 2020 ont totalisé au moins 450 millions de dollars, soit 12% du capital privé total investi en Afrique.
- Plusieurs pays africains mettent en œuvre des initiatives pour promouvoir la Finance Verte. Les banques centrales sont généralement les principaux décideurs et exécutants de la politique du secteur financier, y compris dans le domaine de la Finance Verte.
- Le GCF s’est concentré particulièrement sur l’Afrique. En mars 2021, il avait consacré environ 3,1 milliards de dollars (37 %) de son portefeuille total à des projets dans les pays africains.
- Un verdissement actif du secteur financier est déjà en cours en Afrique. Cependant, le secteur de la finance verte en Afrique est encore relativement sous-développé
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En synthèse, la Finance Climat prend forme de mieux en mieux et se développe d’une année à une autre malgré tous les obstacles et les hésitations qu’elle rencontre à tous les niveaux. Globalement sa genèse a été essentiellement à l’issue des Accords de Paris dans le cadre de la COP21.
En tant que cabinet de Conseil, d’Assistance technique et de Formation, AMEF Consulting a développé son expertise et son offre dans le domaine de la Finance Verte à travers plusieurs missions d’études, de Conseils, d’Assistance Technique ou de Formation réalisées depuis 2015. Nous continuons à capitaliser sur notre expérience dans ce domaine et d’offrir à nos clients nos services d’accompagnement pour le développement de leur activité de Finance Climat aussi bien pour le bien de leur Clients que pour leur propre développement durable et rentable.
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